« Poussière tu seras » , Sam Millar – Points Policier, traduit par Patrick Raynal

sam millarJe lis un peu au ralenti en ce moment : chaleur, fatigue, vacances…Je viens de finir ce bon petit polar de Sam Millar.

Des os refont surface ça et là aux environs de Belfast, sous l’œil attentif des corbeaux de l’hiver. Un os en entraînant un autre, une disparition inexpliquée en amenant une autre, Jack, ex-flic veuf, alcoolique et père d’Adrian va revenir en douce au métier pour finir entraîné dans un cauchemar dont le dénouement mettra au jour bien plus que des ossements, une histoire monstrueuse. J’avais beaucoup aimé « Les chiens de Belfast », et avais compris que Millar ne faisait pas dans la romance policière, mais dans le sanglant, le brutal – très jolie définition de son style en 4ème de couverture : « Il écrit comme on se venge, avec urgence, calcul et précision », vraiment très juste – . On trouve bien déjà  ici  (ce roman a été le premier traduit en France )  ce caractère noir de noir qui fait la part belle à une vision désespérante des noirceurs et des vices de « l’âme » humaine, sans concessions, le tout incarné ici par le terrifiant personnage de Judith, symbole de la vengeance. Je ne raconterai rien de plus de l’histoire, évidemment, prenante et perverse à souhaits, MAIS, car il y a un MAIS…

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Artemisia Gentileschi : Judith beheading Holofernes

Je viens d’écrire un mail rageur aux éditions du Point : ce livre est absolument bourré de coquilles, comme je l’ai rarement vu, et ça m’a gâché ma lecture. Parce que c’est à peu de choses près une toutes les deux pages, parfois deux par page, j’ai renoncé à les compter, à les noter, mais c’est le genre de truc qui m’horripile ! Les livres sont suffisamment chers pour qu’on nous propose une édition correcte et corrigée, relue, ne serait-ce que par respect pour l’auteur. Genre, « apprentis » au lieu d’appentis, « paru » je ne sais combien de fois au lieu de « paruT », plein d’articles oubliés, des fautes d’accord, la totale, insupportable. En lisant les articles d’autres blogueurs, pas un mot de ce problème. Aurais-je eu la malchance d’avoir l’exemplaire unique bourré de fautes ?

Quel dommage, parce que sinon, j’aime bien ce que Points/Policier édite, mais zut alors : RELECTURE ET CORRECTION !

« Les chiens de Belfast », Sam Millar – Points/Policier, traduit par Patrick Raynal

les chiens de belfastEn voici encore un que j’avais mis sur la pile depuis longtemps. Et envie d’un petit tour à Belfast…Bon, je vous préviens tout de suite, ce n’est pas une promenade touristique… Sam Millar signe là un roman répondant à tous les codes du polar, avec le détective Karl Kane flanqué d’une belle fille qui assure l’administratif…mais pas que, réminiscences de cauchemars, traumatismes de l’enfance, avec vengeance qui a attendu son heure dans la rage que génère le chagrin, police qui patauge dans la corruption, scènes sanglantes et humour un peu trash ( j’avoue, j’aime assez…), bref, j’ai passé un bon moment avec ce bouquin, qui bien qu’ayant une intrigue un poil tirée par les cheveux, tient bien son lecteur par sa nervosité de ton et l’absence de temps morts. On ne retrouve pas ici le décor politique et social irlandais comme chez Adrian McKinty ou Stuart Neville, c’est différent, mais vraiment agréable à lire.

Photo : Paul McIlroy

Millar a construit son livre sous une forme qu’on retrouve souvent dans le genre, un prologue avec une scène qui s’est déroulée des années auparavant, puis plusieurs chapitres qui amènent les différents protagonistes, tout ça comme jeté au lecteur avec violence, ça heurte et ça accroche, on a des morceaux de puzzle à  rassembler, et c’est là qu’intervient Karl Kane. En voici un que j’ai bien aimé, il m’a fait rire ; il faut dire que ce pauvre homme est en proie à une crise aiguë d’hémorroïdes ( ben oui, excusez-moi, mais c’est vrai ) qui démystifie quelque peu la figure virile du détective, en particulier dans la scène chez le médecin…Hormis cette anecdote qui a son importance ( influence évidente sur le caractère et l’humeur de Kane…), le ton est très vif, avec un jeu sur les portraits intéressant, et des images parfois hilarantes. C’est noir, sauvage, caustique.

Exemples de phrases qui me font rire :

« C’est toi qui bredouilles un galimatias incompréhensible, genre Mary Poppins sous LSD. » 

« Reste à l’écart de ces Ecossais. Je n’ai aucune confiance dans les types qui portent des jupes. »

« Mince comme un fil mais d’une taille respectable, Karl Kane fit jaillir une goutte de crème du tube et, pour un homme aussi grand, l’appliqua plutôt délicatement sur la partie douloureuse de son postérieur.

« Il a eu ce qu’il méritait, marmonna la vieille dame à l’air angélique du numéro dix-huit, dont les cheveux fraîchement permanentés ressemblaient à une barbe à papa en folie. Et tous ses amis devraient avoir la même chose » suggéra-t-elle en souriant comme un couteau bien affûté. Seules ses fausses dents paraissaient vraies. »

wild-boar-70420_1280Pas un livre d’enfants de chœur, c’est pour ça qu’il m’a plu .

Je n’oublie pas de saluer  Patrick Raynal pour une traduction impeccable.

Et puis si vous voulez savoir ce que vient faire ce sanglier dans l’histoire, eh bien vous savez ce qu’il vous reste à faire.