Je me suis décidée à revenir chez Andrea Camilleri, après plusieurs années d’attente. Je dois dire que j’avais rencontré des difficultés avec la traduction, et ça a été un frein à mon envie de ces aventures siciliennes. Au début de ce livre-ci, Serge Quadruppani ( dont j’ai admiré la traduction de « Suburra » ) explique son choix délibéré de restituer au plus juste les trois niveaux de langage de l’auteur. Ce sont pour le premier l’italien officiel, pour le troisième le dialecte pur, et le niveau intermédiaire, le plus délicat qui est celui de « l’italien sicilianisé », constitué essentiellement de régionalismes. Le traducteur explique parfaitement le bien fondé de sa traduction et la difficulté que ça représente. Le résultat est tout à son honneur. En langue originale, il semble que ce ne soit pas non plus de lecture facile pour un italien, et en version traduite, j’avais laissé tomber parce que je trébuchais sur ces termes si étrangers à ma propre langue. Exemple, avec le verbe « à la Camilleri » :
« ll s’aréveilla le lendemain matin qu’il était 8 heures. Il avait dormi douze heures d’affilée. Il se sentait parfaitement reposé mais avec un ‘pétit à mordre le pied d’une chaise. »
Qu’est-ce qui m’a convaincue de retenter cette lecture ? D’abord JM de L’actu du noir, qui a chroniqué très souvent cet écrivain qu’il aime énormément ( un lien vers ce même titre, mais allez-y, lisez ses autres chroniques sur Camilleri et le reste aussi pendant que vous y êtes ). Puis envie de Sud je pense, et enfin la lecture de l’avertissement de Serge Quadruppani. Il m’a permis de ruser et de trouver un moyen de ne plus buter sur la langue parce qu’en comprenant, tout va mieux. Bref, voici mon retour en Sicile et quel bonheur !
Salvo Montalbano, après une nuit d’insomnie, assiste à la mort d’une mouette, apprend la disparition de son ami et collègue Fazio et en oublie tout à fait ses vacances avec Livia, son amie génoise. Il va alors se lancer dans cette enquête flanqué de l’inénarrable Catarella, entre autres comparses des plus remarquables. Une enquête qui va se dérouler dans une ambiance sicilienne avec mafia, trafic de drogue, contrebande, meurtres et caponata ( oui, je vous donne une recette, parce que c’est tellement bon ! Celle du meurtre mafieux, vous la trouverez dans le roman.) . Quelle rigolade ! Comme ça fait du bien ! D’autant que Camilleri ne manque pas de tacler au passage son pays:
« Les trains arrivent en retard, les avions aussi, les ferries, il fallait une intervention divine pour qu’ils larguent les amarres ; le courrier, n’en parlons pas; les autobus se perdaient carrément dans la circulation ; les chantiers publics manquaient la date de livraison de cinq ou six ans ; n’importe quelle loi mettait des années avant d’être approuvée; les procès traînaient ; même les émissions de télé commençaient toujours avec une demi-heure de retard sur l’horaire… »
La construction du livre et les dialogues sont du plus pur art baroque, éblouissant, réjouissant, avec un comique naturel, et pour finir, je crois bien que Camilleri vient de regagner une lectrice. La dernière phrase :
« Assis sur la véranda, en compagnie d’une dose de mélancolie, il tenta de se consoler avec une énorme portion de caponata. »
Pas toujours simple, la traduction !
Tu as réussi à apprécier ce roman lors de ta deuxième lecture ; peut-être me laisserai-je un jour tenter, mais il est vrai que ça peut rebuter un peu.
Merci pour cette découverte, car en dehors de Quadruppani, je ne connaissais absolument pas.
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Bien qu’en vacances à Lisbonne, je te réponds et suis d’accord avec toi, la traduction est un art difficile. Camillieri est une célébrité en Sicile et je pense qu’il le mérite . Les enquêtes de Montalbano ont été adaptées pour la télé, c’est passé en France mais je ne sais plus sur quelle chaîne mais pas une réussite. Alors mieux vaut le lire !
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Merci, et bon voyage !
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La traduction donne beaucoup de saveurs aux aventures de Montalbano. On rêve d aller manger des pâtes aux sardines ou autre poisson dans son restaurant prefere. Vraiment tres agreable. Sur que la série Tv est vraiment moins bien que les bouquins. J adore camilleri
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Oui, après un temps d’adaptation, on se régale ! En parlant de sardines, ici à Lisbonne, il y a ce qu’il faut aussi ! Et je me dis que la Sicile me tente énormément…
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J’adooooore la caponata!!! En Sicile, je m’en suis goinfrée!
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Moi aussi ! C’est tellement bon !
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Ah et puis j’ai visité le bureau de Montalbano, celui de la série (que je n’ai pas vu et pas lu non plus, mais incontournable là-bas).
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Dans la série, on a l’impression que la ville est morte, il n’y a jamais personne dans les rues…mieux vaut lire !
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Enchanté que tu viennes retrouver la cohorte des fans de Montalbano. Tous les derniers sont très drôles.
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Tu as bien contribué à ce retour, merci!
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J’ai lu beaucoup de livres de Camilleri (pas tous mais peut-être pas loin) et j’aime les traductions de Quadruppani qui me semblent bien rendre les différents niveaux de langages, ce qui se vérifie dans toutes les régions d’Italie. La Sicile est loin d’être la région d’Italie que je connais le mieux, je n’y suis allée qu’une fois et il y a plus de 40 ans, mais dans d’autres régions que je connais mieux et que j’ai visitées il y a bien moins longtemps, en particulier chez des amis en Ombrie, on retrouve ces différents niveaux, l’italien « classique » pourrait-on dire, le patois traditionnel et le mélange des 2 qui donne des choses assez rigolotes quand on comprend l’italien classique. Pas le patois, je n’ai pas cette prétention.
C’est truculent, comme chez Camilleri, et ça fait rêver.
Profite bien de Lisbonne, n’oublie pas de manger les fameux pasteis de nata que j’adore…
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Je ne connais pas autant l’Italie que toi, pas plus bas qu’Assise, et je ne parle pas italien’ ceci explique mon ignorance et la difficulté que j’ai eu longtemps avec ces traductions.Pour ce qui est des Pastéis, un par jour, dont un acheté comme il se doit près du monastère dos JEronimos. Lisbonne est magnifique je découvre et j’adore
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